Soye – guerre 40-45 – réquisition de cloches – 1943

« En souvenir du 4 octobre 1943 »

Telle est l’indication qui figure au verso de la photo ci-dessous reçue de Jeannine Defrêne (qui habite rue de la Basse-Sambre à Soye).
Cette photo a été prise devant la maison qui se trouve juste au pied de l’église de Soye et qui était alors occupée par la famille Havelange. Un café s’y tenait, à côté de celui de Dieudonné Gillain (le « clerc », c’est-à-dire le clerc-chantre) – cabaret qui plus tard fut tenu par Georgine, sa fille, et son mari, Joseph Herquin (« le Quin »), et enfin par Camille Mathieu (« Au vieux Soye »).
Elle est doublement intéressante. D’abord, devant la maison, on voit deux cloches. Ce sont celles de l’église de Soye, qui venaient d’être enlevées par les soldats allemands et étaient en partance pour l’Allemagne. Eh ! oui, nous sommes en 1943, il fallait récupérer le bronze pour en faire des canons…
Cette photo a donc un intérêt historique. Mais pas seulement. Madame Joséphine Gillain (épouse d’Albert Dahin), institutrice du degré inférieur mixte au village, a voulu marquer l’événement en s’y faisant prendre en photo avec sa classe. Quelle belle initiative !
Elle nous permet de revoir des figures de notre village, la « petite » histoire rejoint ainsi la « grande » histoire.

Debout, de gauche à droite :
Gérard Massart (né en 1937) – Jacques Bouchat (né en 1933) – x Vandevorst – Roger Méan ( ?) – Jeannine Defrêne (née en 1936) – x – José Lenoir – Huguette Bierlaire – Elie Hanot – Fernand Mehaignoul (né en 1936) – François Legrain (né en 1936, petit col blanc) – x – x – x – Nelly Defrène – Lucie Lessire (fille d’Alphonse, habitait au Rissart) – Roger Noël (frère de Raymond, sa tête est juste au coin de la fenêtre) – x – Marcel Luc ( ?) – x Vandevorst.
Accroupis ou à genoux ou assis, de gauche à droite :
Marie-Rose Chantraine – un jumeau Bierlaire (Christian ou Walter) – Nelly Gilet – Anna Lemy (à genoux) – Auguste Vandevorst – Jenny Pendville (née en 1937) – Marie Gilet – x au-dessus de la cloche – x (une fille au-dessus d’un jumeau Bierlaire assis).
N.B. : C’est Jeannine Defrêne qui a reconnu les personnes sur la photo. Normal : la photo lui appartient et elle s’y trouve bien présente, elle faisait partie de la classe de Madame Joséphine Gillain.
Nous avons aussi eu recours aux services de Jenny Pendville (elle aussi est sur la photo) et de Nelly Denet.

(Jean Bodson, 30 juillet 2023)

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En complément de cet article, nous joignons une photo provenant des archives personnelles de Monsieur Louis LESSIRE liée à cet événement ainsi que le descriptif des cloches réquisitionnées tiré de « L’histoire de Soye » du même Louis LESSIRE.

  1. Grosse cloche : année 1856 ; sans nom ; diamètre : 90 cm ; hauteur : 75 cm ; poids inconnu ; fabriquée aux usines de Madame la Baronne de Rosée à Warnant par Henri MICHEL ; inscription : A.M.D.G. – Reverendissimi Dni Dni Dehesselle, sub episcopatu Namurunci ac reverendo Dno Philippard , pastore in Soye Dominus Jacobus De Blommaert, Baro de Soye, vidua nata Vanderkun immaculata conceptioni virginis Mariae hanc campanam dedicaverunt. An Dno 1856.
  2. Moyenne cloche : année 1856 ; sans nom ; diamètre 80 cm ; hauteur 65 cm ; poids inconnu ; fabriquée aux usines de Madame la Baronne de Rosée à Warnant par Henri MICHEL ; inscription : A.M.D.G. – Reverendissimi Dni Dni Dehesselle, sub episcopatu Namurunci ac reverendo Dno Philippard , pastore in Soye Dominus Aemilius Baro De Blommaert et Dna Francisca Bna Bara De Blommaert nata Dopff, beatae Maria virgini sanctissimi rosarii hanc campanam dedicaverunt. An Dno 1856.

Ces deux cloches sont décorées de manière identique, à savoir : une double guirlande, deux écussons, un christ et trois statues (la Vierge et deux évêques), les écussons (l’un avec trois roses et l’autre avec couronne divisé en quatre quartiers).

Seule survivante, la petite cloche continua d’habiter la tour de l’église jusqu’au moment où le curé Ledoux déplaça temporairement une des petites cloches de la chapelle de Jodion, afin d’occuper quelque peu le vide laissé par l’enlèvement des deux cloches par l’occupant allemand.

Cette situation perdura jusqu’en 1951, époque à laquelle le curé Ledoux décida de faire fondre deux nouvelles cloches pour l’église de Soye. Bénies dans le courant de 1951, elles rejoignirent leur aînée de 1856, pour reformer le trio démembré en 1943.

De gauche à droite : Mme Elvire PIRARD, épouse Lucien LEGRAIN ; M. le curé Albert LEDOUX ; Melle Maria NOYON ; M. René GILLAIN, Bourgmestre ; Mme FROUZE ?

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Nous terminons par un résumé de l’article  » La réquisition des cloches par l’occupant » publié par Monsieur Fabrice Maerten, responsable de la valorisation des collections du Cegesoma (Centre d’expertise belge de l’histoire des conflits du 20ème siècle) dépendant des Archives de l’Etat,

Avortée en 1917-1918, la réquisition des cloches est décidée par l’occupant par l’ordonnance sur la livraison des métaux non ferreux du 20 octobre 1941 mais les autorités allemandes suspendent alors son application pour les cloches.
Le cuivre et surtout l’étain qui les composent manquent pourtant à l’Allemagne.
En effet, les avions, les sous-marins et les nouveaux composants électroniques des radars nécessitent une grande quantité de métaux non ferreux.
En décembre 1942, ces mêmes autorités édictent une nouvelle ordonnance exigeant notamment la livraison de toutes les cloches. Les évêques de Belgique s’y opposent fermement. Suite à cette vive réaction, cette décision est tenue en suspens, pour un temps en tout cas.
Une Commission pour la sauvegarde des cloches est créée le 18 mai 1943 au sein du Ministère de l’Instruction publique en vue d’en sauvegarder le plus grand nombre possible et un accord est conclu avec l’occupant. Les cloches sont ainsi classées en cinq catégories: les quatre premières en fonction de la date de la cloche, la cinquième constituant une catégorie spéciale. Seules les cloches des deux dernières catégories,
soit celles fondues avant 1730 et celles regroupant les carillons et une cloche d’appel par église seront sauvées.
À partir du quatre mai 1943, les dizaines de voitures et camions de la firme adjudicatrice Nicolas van Campenhout, de Haren, sillonnent notre pays pour enlever les cloches.
La population réagit avec tristesse mais aussi avec résignation à cette opération
d’enlèvement des cloches qui seront expédiées par péniches vers le port d’Hambourg pour y être fondues. Quelques 4 104 arriveront finalement en Allemagne.
À l’issue de la guerre, on recensera officiellement la perte de 3 365 d’entre elles et de nombreuses années seront nécessaires pour les remplacer.

 

 

1 Commentaire

  1. DIDIER VERVLOESSEM

    soye mon village natal quelle nostalgie

    Réponse

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