La conclusion de Bibliotheca Floreffia et bibliographie
L’examen des documents et parcours militaires des appelés de Floreffe extraits des publications de M.Jean Evariste (Département de Sambre et Meuse / Canton de Fosses) nous révèle que, sur la période de 1797 à 1814, soit 18 années, il y eut 81 appelés. Selon notre auteur, la population locale (en ce compris Sart-Saint-Laurent qui, pour sa majeure partie, faisait partie intégrante de Floreffe) était de 1 182 habitants en 1801.
A. La proportion des jeunes gens appelés sous les armes.
Nous constatons qu’hormis les années 1800 et 1804 qui comptent respectivement sept et six appelés, la période 1797 – 1808 reste favorable du point de vue du recrutement. Ainsi, on dénombre :
en 1797, 1798, 1799 et 1802 : une seule recrue;
en 1805 et 1806 : deux recrues;
en 1801, 1807 et 1808 : trois recrues;
en 1803 : quatre recrues.
Dans le même laps de temps, nous relevons le nombre de sept engagés volontaires et quatre conscrits dont on ignore le sort.
A partir de 1809, le nombre d’appelés se révèle nettement plus important. Qu’on en juge :
en 1811 : cinq recrues;
en 1813: six recrues;
en 1810 et 1814 : sept recrues;
en 1809 : dix recrues;
en 1812 : douze recrues.
B. Les victimes.
Le nombre des décès avérés s’élève à seize et les décès présumés à six.
Parmi ces derniers, quatre sont consécutifs à la retraite de Russie (1812), le cinquième fait suite à la bataille de Wagram (Autriche, à proximité de Vienne, en 1809) et le sixième est renseigné comme concernant un militaire entré à l’hôpital le 30/12/1813 et rayé des contrôles le 31/3/1814.
Le total de ces victimes représente près de 28% des appelés de Floreffe alors que les estimations actuelles des morts dus aux guerres napoléoniennes tournent autour de 30%.
Nous donnons ci-dessous le détail des victimes par dates des décès :
Norbert Joseph Delaitte : né à Floreffe le 29/6/1778, conscrit de la classe 1800 et incorporé en janvier 1799. Renseigné comme prisonnier des Autrichiens en Toscane et mort dans les prisons d’Autriche en ventôse de l’an IX (février/mars 1801).
Pierre Stiernon : né à Floreffe en 1781, enrôlé volontaire, incorporé le 9 messidor de l’an VII (27/06/1799), entré à l’hôpital militaire de Nantes le 30 fructidor de l’an IX (17/09/1801) et y décédé le 27 vendémiaire de l’an X (19/10/1801) par suite de fièvre.
Henri Joseph Berger : né à Floreffe le 28/3/1781, conscrit de l’an X (1802), remplaçant un conscrit de l’an XIII (1805), mort le 27 fructidor de l’an XII (14/09/1804) à l’hôpital de Parme (Italie), par suite de fièvre.
Hubert Joseph Jeanlet : né à Floreffe le 22/6/1782, conscrit de l’an XI (1803), entré le 23 thermidor de l’an XIII (11/08/1805) à l’hospice civil Saint Jean le Décollé, rue Saint Jacques à Namur et y décédé le 30 fructidor à 10h du soir, de l’an XIII (17/09/1805) par suite de fièvre.
François Joseph Moreau : né à Floreffe le 10/4/1785, conscrit de l’an XIV (1806), incorporé le 26/1/1806, entré le 3/12/1806 à l’hôpital de Conegliano (Treviso) et y décédé le 9/12/1806 par suite de fièvre.
Norbert Joseph Thirot : né à Floreffe le 18/4/1784, conscrit de l’an XIII (1805), incorporé le 6 thermidor de l’an XIII (25/07/1905) à Coblenz, mort le 25/11/1807 à l’hôpital de Custrin (Ouest de la Pologne), de fièvre adynamique.
Norbert Joseph Dricot : né à Floreffe le 6/6/1780, conscrit de l’an IX (1801), incorporé le 25 pluviôse de l’an XI (14/02/1803) à Coblenz, entré à l’hôpital du séminaire d’Udine le 3/11/1808 et y décédé le 31/1/1809 par suite de diarrhée.
Jean Joseph Biot : né à Floreffe le 3/8/1789, conscrit 1809, entré à l’hôpital de Weissembourg (Bavière) le 14/11/1809 et y mort le 27/11/1809 par suite de fièvre.
Noël Joseph Henne : né à Floreffe le 22/12/1789, conscrit 1809, incorporé le 30/12/1808, rentré à Vérone (Italie) le 20/10/1809 et mort le 1/2/1810 à l’hôpital du séminaire d’Udine.
Gilles Lambotte (Lambiot?): né à Floreffe (Buzet) le 13/9/1790, conscrit 1810, incorporé le 8/3/1809, entré le 1/3/1812 à l’hôpital du Val de Grâce – 12ème arrondissement de paris, et y décédé par suite de fièvre le 6/3/1812, à cinq heure et demi de relevée.
Michel Joseph Moreau : né à Floreffe le 21/10/1789, conscrit 1809, incorporé le 27/4/1808, tué au siège de Tarragone (Catalogne) le 7/6/1811.
François Joseph Riboux : né à Lesve le 12/10/1791, conscrit 1811, incorporé le 17/4/1811 à Lille, entré le 29/10/1811 à l’hôpital militaire de Hambourg (Allemagne) et y décédé le 9/1/1812 par suite de diarrhée chronique.
Jean François Jadot : né à Floreffe le 26/3/1794, conscrit 1814, incorporé à Givet le 2/4/1813, à l’hôpital de l’hospice de Namur du 9 au 21 août 1813, décédé à Givet le 10/10/1813.
Jean Joseph Devigne : né à Floreffe le 20/7/1794, conscrit 1814, incorporé le 18/4/1813 à Wesel (Allemagne), tué d’un coup de feu le 30/8/1813 à Kulm (aujourd’hui Chlumec) en République de Tchéquie.
François Joseph Thirot : né à Floreffe le 29/7/1789, conscrit 1809, remplaçant Guillaume François Gillet de Spontin, conscrit 1809, incorporé le 14/4/1809, mort à l’hôpital de Salamanque de dysenterie à une date inconnue.
Les décès présumés.
Simon Vanherque : né à Floreffe le 25/3/1784, conscrit de l’an XIII (1805), incorporé le 8 prairial de l’an XIII ( 28/05/1805) à Namur; sans nouvelle depuis Wagram (Autriche, à proximité de Vienne) le 6/7/1809. Rayé des contrôles pour longue absence le 20/12/1809.
François Baude : né à Floreffe le 31/5/1784, conscrit de l’an XIII (1805), présumé mort ou prisonnier en Russie en 1812.
René Joseph Lhéritier : né à Floreffe le 15/9/1780, conscrit de l’an IX (1800), incorporé le 1er nivôse de l’an XII (23/12/1803), présumé mort ou prisonnier de guerre en Russie en 1812.
François Joseph Thirot : né à Floreffe le 2/8/1785, conscrit de l’an XIV (1805), incorporé le 21/6/1806, présumé prisonnier ou mort en Russie en 1812.
Guillaume Joseph Piette : né à Profondeville le 10/6/1791, conscrit 1811, parti de Namur le 10/4/1811, incorporé le 17/4/1811 à Lille, présumé mort en Russie et rayé des contrôles le 1/4/1815.
Hubert Wiame : né à Floreffe le 18/6/1793, conscrit 1813, parti de Namur le 19/11/1812, incorporé le 26/11/1812 à Longwy, entré à l’hôpital le 30/12/1813, rayé des contrôles le 31/3/1814.
C. Les théâtres d’opérations.
Les appelés de Floreffe, dans leur très grande majorité, ont combattu sur des champs de bataille éparpillés à travers toute l’Europe (voir les autres villages de notre entité).
Une des grandes caractéristiques des soldats de cette époque, c’est leur capacité à se déplacer, le plus souvent à pied pour les hommes valides, sur de très grandes distances. La moyenne journalière était d’une trentaine de kilomètres mais il leur arrivait d’en parcourir parfois le double, sur une journée, et cela, avec des chaussures qui ne tenaient pas la comparaison avec nos chaussures de marche d’aujourd’hui.
D. L’esprit de résistance.
Alors que les militaires français à l’époque napoléonienne parlaient de «notre empereur» lorsqu’ils évoquaient leur général en chef, les appelés de nos régions disaient plus simplement «l’empereur», marquant ainsi qu’ils étaient sous les armes bien malgré eux et se battaient pour une cause à laquelle ils se sentaient étrangers.
D’ailleurs, après l’abdication de Napoléon, nos appelés qui seront congédiés régulièrement de l’armée, le seront pour ce motif qu’ils étaient redevenus des «étrangers» …
Mais beaucoup d’entre eux feront peu de cas de ces formalités administratives et rentreront directement dans leurs foyers. Ainsi s’explique un certain nombre de «désertions» dans les derniers mois du régime impérial.
Pour ce qui concerne les fuyards en route, il convient de se rappeler que les appelés, lors de leur incorporation, devaient rejoindre leur unité par leurs propres moyens, c’est-à-dire à pied pour la plupart d’entre eux et les distances à parcourir étaient souvent bien longues. On cite l’exemple d’appelés à Cherbourg qui, au départ de Namur, mirent 26 jours pour rejoindre ce port de guerre. La tentation de fuir devait être forte …
Les motifs de désertion ne manquaient certes pas mais la hiérarchie militaire savait à l’occasion, fermer les yeux soit en procédant à des amnisties générales, soit en envoyant les «repentis» vers des compagnies disciplinaires.
A quoi bon en effet, fusiller des déserteurs repris ou revenus de leur plein gré, alors que les combats incessants exigeaient toujours plus de chair à canon.
Nous distinguerons donc, parmi les déserteurs, réfractaires ou fuyards en route, ceux qui se sont représentés et ont fait amende honorable et ceux dont le sort ne nous est pas connu.
Le cinq mai 2021 verra la commémoration du bicentenaire de la mort de l’Empereur Napoléon et dès à présent, de nombreuses expositions en rapport avec cet événement sont proposées à la curiosité de nos concitoyens (à Paris, Liège, Ligny et Waterloo notamment).
Dans notre région, les marches folkloriques de l’Entre Sambre et Meuse rappellent chaque année cette période de notre histoire où nous étions Français.
S’il est indéniable que Napoléon est un personnage exceptionnel et hors du commun,
nous ne pouvons oublier cependant les milliers de jeunes gens enlevés à leurs foyers et les trop nombreuses victimes innocentes de ces guerres qui ne les concernaient pas.
Uniformes des armées européennes entre 1800 et 1815.
André Bodson et l’équipe de Bibliotheca Floreffia
Bibliographie
Blond Georges : La Grande Armée (Édit.Robert Laffont, 1979)
Damamme Jean-Claude : Les soldats de la Grande Armée (Collection Tempus, 2008)
Drévillon Hervé, Fonck Bertrand et Roucaud Michel: Guerres et armées napoléoniennes : nouveaux regards, éditions Nouveau Monde, coll. Chronos, 2020.
Evariste Jean : Département de Sambre et Meuse – Militaires sous la République, le Consulat et l’Empire. Cantons de Namur Nord et de Namur Sud (Namur non compris) (Société d’archéologie et d’histoire du Florennois ASBL, édit. Jean Evariste, 2013)
Facon Patrick, Grimaud Renée, Pernot François : Les plus belles victoires de Napoléon (Edit.Atlas, 2003)
Forrest Alan : Déserteurs et insoumis sous la Révolution et l’Empire (Édit.Perrin, 1988)
Hasquin Hervé : La Belgique française, 1792-1815 (Conception et direction scientifique d’Hervé Hasquin (Édit. Crédit communal, 1993)
Maurois André : Napoléon (Édit.Hachette, 1964)
Pirenne Henri : Histoire de Belgique (La Renaissance du Livre, 3e tome, 1950)
Rothenberg Gunther E. : Atlas des guerres napoléoniennes (Édit.Autrement, 2000)
Scheltens Colonel : Souvenirs d’un grognard belge (comprenant une introduction historique par le vicomte Charles Terlinden – Edit. Charles Dessart, s.d.)
Tassier Suzanne : Histoire de la Belgique sous l’occupation française en 1792 et 1793 (Librairie Falk Fils, 1934)
Tulard Jean : Napoléon, Arthème Fayard, coll. Pluriel, 2021.
Verhaegen Paul : La Belgique sous la domination française 1792-1814 (Édit.Goemaere, trois tomes, 1924-1926)
0 commentaires